Discours de Wopke Hoekstra à l’occasion du lancement de la présidence néerlandaise de l’union Benelux
Discours de W. Hoekstra, ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas, à l’occasion du lancement de la présidence néerlandaise de l’union Benelux, le 9 février 2023 à La Haye. Seul le texte prononcé fait foi.
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes aujourd’hui réunis pour regarder vers l’avenir.
Vers les thèmes importants qui préoccupent nos pays : le marché intérieur, la transition énergétique, la migration.
Mais je dois reconnaître qu’en franchissant ce matin le seuil de ce somptueux édifice, la cour d’Espagne comme on l’appelle, c’est au passé et à notre histoire commune que j’ai pensé.
Ce palais a été construit au XVe siècle par un conseiller de l’empereur Maximilien Ier de Habsbourg, ce que vous saviez tous bien entendu mais que j’ai pour ma part récemment découvert.
Si c’est par hasard que ce palais accueille notre rencontre, l’écho des siècles est toutefois révélateur.
Car déjà à cette époque, à la fin de l’ère bourguignonne, alors que s’amorçait l’ascension des Habsbourg, nos pays étaient rassemblés au sein d’une Union.
D’une nature différente de celle d’aujourd’hui, bien sûr.
Il n’y avait pas encore d’États indépendants, mais des territoires qui tissaient généralement des liens au moyen de mariages stratégiques.
D’une certaine manière déjà précurseurs de l’intégration européenne.
Le successeur de Maximilien, Charles Quint, originaire de Gand et figure primordiale de nos livres d’histoire, régnait sur un territoire tellement immense qu’il se devait d’être polyglotte.
On rapporte qu’il prétendait parler espagnol à Dieu, italien aux femmes, français aux hommes et allemand à son cheval.
C’est heureusement en néerlandais que je peux m’adresser à vous aujourd’hui – même si l’histoire ne nous dit pas à qui Charles Quint réservait cette langue.
Mesdames et Messieurs,
Voilà des siècles, la guerre de quatre-vingts ans a scindé nos territoires et tracé des frontières qui sont encore en partie les nôtres.
La guerre, pourrait-on dire, nous a divisés mais aussi, dans une large mesure, rassemblés.
En effet, c’est durant la Seconde Guerre mondiale que nos gouvernements se sont retrouvés à Londres, où ils ont décidé de coopérer beaucoup plus étroitement après la victoire.
Le mythe veut que cette idée ait germé lors d’un match de football opposant la Belgique aux Pays-Bas, quelque part à Londres.
De tous les matchs disputés entre nos deux pays, celui-ci fut incontestablement le plus gagnant.
Car nous contemplons aujourd’hui sept décennies de coopération trilatérale.
Le Benelux a de ce fait toujours été pionnier en matière d’intégration européenne.
C’est ici, au Benelux, que les premières expériences de coopération économique ont été faites, au sein d’un espace de libre échange, soutenu bien sûr par une union douanière.
Pour rester dans le champ lexical du sport : nous formons depuis des dizaines d’années le peloton de tête de l’Europe.
Et pour conserver cette position – ce qui est mon ambition, comme celle de beaucoup d’entre vous je pense –, il nous faut continuer à investir dans cette formidable coopération.
Aussi la présidence néerlandaise sera-t-elle axée cette année sur les thèmes qui nous rendent – ensemble – plus forts.
La consolidation du marché intérieur, la transition énergétique durable, l’amélioration de la coopération transfrontalière, et enfin : la sécurité et la migration. Autant de thèmes qui occupent une place prépondérante dans l’agenda de nos trois pays.
Je citerai trois exemples de sujets sur lesquels nous allons porter nos efforts dans l’année à venir avec le nouveau Collège et les ministères concernés.
Premièrement, une action Benelux concertée en faveur du marché européen. Et plus précisément : en ce qui concerne la future stratégie européenne relative au marché intérieur. Cela pourra servir d’apport au programme de travail de la Commission européenne qui sera installée en 2024.
Deuxièmement, une économie Benelux entièrement circulaire d’ici 2050. Et nous plaidons au niveau européen en faveur d’objectifs ambitieux et tranchés. Car c’est le cap à suivre.
Troisièmement, nous voulons durant la présidence accroître la notoriété des instruments juridiques au sens large du Benelux. Il me semble parfois que c’est aux Pays-Bas que le besoin s’en fait le plus sentir. Il est en effet important, dans la recherche de solutions, d’exploiter de façon adéquate les possibilités offertes par l’instrumentaire juridique du Benelux.
Et puis : dans le cadre justement de la coopération politique élargie entre les membres du Benelux, je vais de nouveau entreprendre des visites de travail avec mes estimés collègues de Belgique et du Luxembourg. Nous réfléchissons encore au pays dans lequel nous allons nous rendre.
J’ai cru comprendre que nos premiers ministres avaient peut-être l’intention de suivre notre exemple.
Excellente nouvelle, à mon avis. C’est une forme de diplomatie qui non seulement est en prise sur l’actualité mondiale, mais cadre aussi parfaitement avec notre esprit collectif.
Mesdames et Messieurs,
Cela fait des décennies que nous démontrons sur la scène européenne et mondiale que l’union fait la force.
Et l’on pourrait dire que cet exemple a été suivi avec succès à une plus grande échelle par l’Union européenne.
Cette année encore, nous continuerons à joindre nos efforts pour rester précurseurs sur les thèmes qui toucheront de plein fouet notre continent dans les décennies à venir.
Mesdames et Messieurs,
Nous avons encore un long et passionnant programme devant nous, donc je vais conclure.
Nous ne sommes plus au temps des Habsbourg, et sceller une union de coopération ne passe plus par un mariage stratégique.
Désormais, c’est la présidence roulante qui remplit ce rôle.
C’est moins romantique, plus professionnel, mais depuis des décennies la base solide pour une coopération réussie.
Assumer la présidence cette année est donc un honneur et un plaisir.
Je me réjouis de mettre tout en œuvre, avec vous, pour en faire un succès. Et je tiens à remercier de tout cœur ceux qui se sont investis sans compter à cet effet et qui s’y emploieront encore cette année.
Merci de votre attention.